STYLE


    La musique pour piano constitue une part majeure de l’œuvre de Louis-Noël Belaubre.

   Les surenchères techniques romantiques et modernes y sont dépassées au profit des qualités de clarté et de lyrisme, et de la diversité des modes d’attaque. Le contraste legato – staccato successivement ou simultanément, est un des moyens expressifs usuels ( 2e mouvement des 2e  et 3e  Sonates pour piano ). Mais la clarté de la ligne mélodique constitue la qualité première de l‘écriture de L.-N. B. Evidente bien qu’imprévisible, la mélodie est fréquemment souveraine et régit souvent les durées : la liberté de ses élans est entérinée par une métrique variable et souvent impaire ( Rêverie à 13 temps et Etude en 3 pour 5 de la poétique du piano ; 3e mouvement de la 3e  Sonate pour piano).


   Ce goût des rythmes irréguliers est issu de la fréquentation de la musique populaire, en particulier celle d’Europe centrale par l’intermédiaire de B. Bartok.


   Pour L.N.B. aucun paramètre musical ne peut être envisagé isolément. Aussi la maîtrise de l’organisation verticale des sons reste-t-elle une nécessité pour lui et aucune place ne saurait être accordée au hasard. Dans son œuvre, les successions harmoniques s’inscrivent dans une logique entièrement originale mais toujours fondée sur les affinités et attractions entre les sons, réalisant une musique à " polarité tonale " où la dissonance retrouve ses vertus dynamiques et expressives, une musique variable, ambiguë et jamais prévisible. L.N.B. se plaît à unir les contraires ( Fugue aux tons opposés de la Poétique du piano ) mais dans un équilibre harmonieux qui veut entraîner l’adhésion.


   Le dodécaphonisme est, par gageure, employé dans une acception de type tonal ( 1er Concerto pour piano, Passacaille de la 2e  Sonate pour piano ) et même la bitonalité unit plus qu’elle ne dissocie ( 1er mouvement de la 2e Sonate pour piano ).


   Le refus délibéré de tout système, le choix d’un processus de composition empirique et la référence permanente aux réalités de la perception musicale ont conduit L.N.B. à un langage qui respecte et suscite l’activité de la conscience auditive. La présence d’éléments repérables autorise la maîtrise du temps musical par le jeu de la mémoire. La part de nouveauté est dosée pour la meilleure intégration de l’œuvre.


   C’est pour une autre musique de notre temps – parole de compositeur et non objet sonore- que L.N.B. refuse les diktats de la mode et choisit une position indépendante en assumant une filiation choisie. A travers un langage actuel, c’est notamment un équivalent de " l’humor " schumannienne qui s’incarne dans une grande diversité du tissu musical suivant la mobilité des affects, ainsi que dans un penchant naturel pour un versant nocturne de l’expression.

   L’imprégnation germanique évidente laisse cependant libre cours à certains aspects de l’esprit français. Témoins le goût éventuel pour les petites formes et la propension à une nostalgie légère, à l’ironie malicieuse et à la satire ( évocations animalière et quolibets des Rêves de Camille ), voire à la veine gaillarde ( chœur à boire de l’Ode à Jean de La Fontaine ).

   Compositeur indépendant, c’est en toute lucidité qu’il donne, comme H. Dutilleux ou B.Britten, une réponse individuelle aux problèmes esthétiques de la fin du XX° siècle.



Extrait de l’article du dictionnaire Bordas (Marc Honegger)

 

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